

Dans la vision du monde esquissée par le Forum économique mondial (WEF) à travers des projets comme le Great Reset, de nombreux aspects de la vie quotidienne sont appelés à se transformer en services externalisés, accessibles via des plateformes numériques. Habiter, se déplacer, se nourrir : autant d’activités qui pourraient ne plus reposer sur la propriété ou l’autonomie individuelle, mais sur une logique d’accès conditionné, d’abonnement et d’intermédiation technologique. Cette mutation, vendue comme un progrès durable, annonce-t-elle un monde plus fluide ou bien une dépendance généralisée aux opérateurs privés globaux ?

Les grandes métropoles mondialisées développent des projets de « housing-as-a-service », dans lesquels l’habitat devient un produit flexible, réservé par application, partagé entre plusieurs utilisateurs, et optimisé par intelligence artificielle.
Dans ce modèle, la propriété résidentielle devient marginale. Le locataire ne choisit plus librement son lieu de vie sur le long terme, mais s’adapte à une offre définie par des algorithmes. Cela favorise une mobilité contrainte et déterritorialisée, incompatible avec les logiques d’enracinement et de souveraineté patrimoniale.

Le WEF promeut activement les solutions de mobilité "intelligente" : voitures en libre-service, abonnements multiservices, réseaux de transport à la demande. À terme, l’usage remplace la possession — chacun paie pour se déplacer selon ses besoins immédiats.
Mais cette externalisation implique une surveillance constante des déplacements, des conditions d’accès évolutives (coût carbone, score social, statut vaccinal, etc.) et une exclusion silencieuse des territoires non rentables. Loin d’émanciper, cette mobilité externalisée peut devenir un outil de gestion comportementale.

L’alimentation personnalisée, promue comme solution santé et écologique, repose sur l’analyse des préférences, des carences, des allergies, via des outils numériques. Des plateformes proposent des menus sur abonnement, livrés à domicile ou retirés en points connectés.
En arrière-plan, se dessine une industrialisation technologique de la nutrition, où les choix sont guidés, restreints, puis automatisés. Le rapport à la terre, aux producteurs locaux, à la cuisine traditionnelle se dilue dans un flux logistique géré par des opérateurs globaux.

Transformer les besoins essentiels en services externalisés rend les citoyens structurellement dépendants d’une infrastructure numérique contrôlée par des consortiums privés. Le logement, la mobilité et l’alimentation deviennent des fonctions pilotées à distance, monétisées, et potentiellement conditionnées par des paramètres idéologiques, écologiques ou sanitaires.
Ce modèle remplace la souveraineté par l’optimisation algorithmique de l’existence, et marginalise ceux qui refusent ou ne peuvent s’adapter à ces logiques.

La transformation des fonctions vitales (habiter, se nourrir, se déplacer) en services externalisés n’est pas neutre : elle redéfinit les rapports de pouvoir, de propriété, et d’autonomie dans la société.
Le modèle promu par le Forum économique mondial ouvre la voie à un monde où l’individu n’est plus qu’un utilisateur temporaire de droits conditionnés. Repenser ces enjeux, c’est défendre la capacité à posséder, choisir, transmettre — bref, à vivre en tant que citoyen souverain, et non en client captif d’un système intégré.